dimanche 10 août 2014

Tracks ou the Camel Lady


Attention : les lecteurs doivent être conscients que cet article contient des images ou des noms de personnes décédées pouvant causer la détresse des aborigènes et des habitants du détroit de Torres.

«Pourquoi ?» C'est la question à laquelle Robyn Davidson s'est souvent heurtée quand on l'interroge sur son incroyable périple de 2700km à travers le désert australien. Un trek de neuf mois d'Alice Springs jusqu'à l'océan indien accompagnée par quatre chameaux et son chien. Un long voyage qui nous confronte au «bush», ces étendues plates, tantôt à la végétation éparses tantôt arides, avec cette terre ocre qui convoque l'âme des premiers hommes qui en foulaient la surface sacré si inhospitalière. 

«Pourquoi pas ?» Contrairement à un certain Christopher McCandless, la démarche de la jeune fille de 25 ans est plus réfléchie et ne témoigne d'aucune fuite en avant. L'idée est de s'éprouver. Le choix des chameaux est le plus adéquat, la motorisation ne permet pas de s’imprégner en profondeur du paysage. Elle acceptera de se faire sponsoriser par The National Geographic ; leur condition est sans appel, un photographe l'accompagnera ponctuellement pour figer des instants de son parcours.

«Parce que !» Tout est invocable - le suicide de sa mère, comme sa fréquentation du mouvement beatnik de Sidney : The Push, la vie au grand air, la liberté qu'on ne lui cloisonnait pas comme aujourd'hui avec nos gosses et qui pourtant construit une personnalité - alors que le déclic ne tient qu'à elle. Ce grain de folie qu'on considère avec amusement, elle, elle l'a chéri, couvé, pendant ces deux ans où elle préparait son voyage en se confrontant au métier de chamelier, pour enfin le faire germer.

«Et donc ?» Tracks, c'est le récit qu'elle rédigera à posteriori. On peut prendre ça comme un récit féministe : fin des années 70, l'émancipation du sexe faible, une femme peut très bien vivre comme elle l'entend et surtout sans mari. Ou comme ce qui l'est, un récit de voyage : un hymne au dépassement, des anecdotes sur les chameaux, ces animaux formidables et fidèles mais aussi drôles quand ils sont soumis à leurs humeurs. Enfin le travail du photographe Rick Smolan vient illustrer avec émerveillement les mots de la jeune fille.

«Pas mal !» En 2014, c'est dans les traits de la polonaise Mia Wasikowska (Only Lovers Left Alive, Restless) qu'est incarnée la femme aux chameaux. Le film est beau à crever. Par les paysages forcément, l'aventure bien sûr, l'actrice ensuite, mais enfin parce qu'il traduit à la perfection cette symbiose, cet abandon à mère nature, cet accablement bienheureux quand on jette un regard en arrière à la zone de confort, quelque part à l'horizon, là où on l'a laissé. Cet état de grâce qui touche aux divins.

Des extraits du livre
Bande-annonce du film

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