jeudi 14 février 2013

De Stendhal à Baraka

La capacité d'étonnement est une chose précieuse qu'il faut chérir. Que ce soit à travers ces grâces fugitives s'égrainant dans notre quotidien, ou dès lors qu'il, le Beau, se déploie dans toute son envergure, il faut conserver coûte que coûte cette naïveté à aborder la vie sans préjugés. Le voyage, lui qui remet en cause nos routines, est l'occasion de s'exercer. Sauf que parfois, ça peut aller trop loin. Et Stendhal est là pour témoigner. En voyage à Florence en 1817, le célèbre écrivain français se vit contenter par la beauté de la ville. Jusqu'à en être submergé au point que le corps prenne le dessus sur la raison ; le degré de passion était tel quel la tachycardie, les vertiges voire même les hallucinations l'assaillaient à cet instant où la profusion de culture avait atteint l'excès. C'est ce qu'on a appelé aujourd'hui sobrement le syndrome de Stendhal. Et plus généralement, on l'associe aux syndromes du voyageur qui rassemble des troubles aux multiples causes qui touche surtout ceux qui n'ont pas anticipés ou ne sont pas pré-munis à vivre telle confrontation. Illuminations et visions enthéogènes dans l'omniprésence religieuse de Jérusalem, vacillement de la pensée et symbiose avec le tout en Inde où nos repères n'ont plus cours. De nombreux touristes japonais se sont aussi vus hospitalisés pour trouble psychiatrique après une visite dans le Paris loin de celui qu'ils avaient pu idéaliser!


Baraka, film de 1992, réalisé par Ron Fricke pourrait tout à fait lui aussi être une cause supplémentaire de dérèglement psychologique. C'est que ce documentaire sans parole nous livre rien d'autres que de magnifiques images du monde à s'en pâmer. En effet, l'équipe de tournage a parcouru le globe pendant quatorze mois pour réunir entre autres des séquences de lieux reculés et rares. Aujourd'hui en 2013, ces sites ne sont plus tous si inconnus du grand public mais une découverte est toujours la bienvenue (coup de coeur pour la Mosquée Shah Cheragh en Iran). A chaque plan, on retrouve ce même soin de la composition digne de la photographie. Baraka, c'est aussi l'homme replacé dans ce qu'il a de plus fondateur : sa spiritualité. Musulmans, chrétiens, juifs, derviches tourneurs, bouddhistes et autres rituels aborigènes viennent témoigner de cette volonté de communion. Les bonshommes bleus de l'Avatar de James Cameron n'ont d'ailleurs rien à envier au Kecak ou Chant du Singe de Bali. D'autres séquences plus dures viennent nous bousculer mettant en exergue les aspects destructeurs de l'humanité comme la misère ou les dérives du «progrès». On oubliera pas de parler de la bande son signée Dead Can Dance qui est à tomber. Baraka est à découvrir, de préférence en HD, par ici. Pour aller plus loin, la bande-annonce de son dernier film en date Samsara par ici

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