mardi 17 juillet 2012

Le mec de QWOP

Je l'ai regardé, il m'a regardé, on s'est regardés. QWOP, j'ai rencontré le mec de QWOP. Bennett Foddy, de son nom, philosophe à l'Université d'Oxford le jour, écrit sur les questions morales que peuvent entraîner l’usage des nouvelles technologies et entre autres l'addiction qui peut en découler. Mais la nuit, dans un élan de procrastination vis à vis de sa profession diurne, il se change en vil créateur de jeux vidéos qui vont pourrir ta vie! En effet, avec QWOP, son jeu le plus plébiscité négativement et encensé par de multiples mails de haine, le joueur que tu es devient vite névrosé. Le principe est pourtant simple ; on incarne un athlète qui court le 100m. Cependant Bennett a fait en sorte que l'action la plus évidente pour nous tous requiert un apprentissage : la capacité de marcher. En tapant rageusement sur les quatre touches Q, W, O et P contrôlant une cuisse ou un mollet du sprinteur, on se laisse aller à effectuer toutes sortes de joyeuses cabrioles voire même de parcourir une distance négative... Face à l'euphémisme qui voudrait que le jeu soit un peu dur, une communauté s'est créée au travers d'un mème, les uns vont rager, tandis que les autres vont se moquer du grotesque des positions désarticulées que peut prendre l'athlète. Bennett n'est pas à son coup d'essai ; on retiendra GIRP nominé à l'IGF 2012, la frustration moindre mais tout autant addictif.


C'est qu'en fait Bennett, en plus de tous ses vices, est aussi un ancien membre fondateur du groupe de rock Cut Copy où il officiait en tant que bassiste. Leur dernier album Zonoscope sorti en 2011 a eu une bonne réception par les critiques. On notera au passage que la pochette de l'album reprend un photomontage de  l'artiste japonais Tsunehisa Kimura qui fait figurer dans son travail des scènes d’apocalypse urbaine totalement surréalistes. Donc Bennett, dans l'optique de faire rager ses anciens camarades du groupe, a décidé d'éditer un mini-jeu visuellement très rose incluant le titre le plus long (15min) de leur dernier album : Sun God. Pas aussi «méchant» que ses autres jeux comme il le dit lui même, l'idée consiste juste à expérimenter la chanson d'une manière plus immersive. Pour se faire, il va falloir apprivoisé le gameplay assez simple où il suffit de faire sauter un personnage puis presser de nouveau la même touche pour qu'il tire sur la corde entraînant le second personnage vers l'avant qui a son tour entraînera le premier dans un mouvement d'inertie qui se répétera inlassablement. Le rythme ainsi maîtrisé, on pourra flotter tout du long de la chanson, sans escale pour les plus habiles. Pris dans la répétition du gameplay, les décors roses qu'on distinguent de moins en moins et la musique qui se fait de plus en plus deep, l'expérience est totalement psychédélique au point que le but est atteint : on fait corps avec la chanson. Le jeu est disponible sur le site de Pitchfork.

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